Le blog du Sweet And Hot

Hommage à Johnny Peret - Part 1

Grand amateur de big bands, tels ceux de Buddy Rich, Woody Herman, Rob McConnell, Count Basie, Les Brown ou Bob Florence, notre ami Johnny Peret était un habitué des réunions du Sweet And Hot pendant plus de 35 ans. Il est donc tout à fait normal que nous lui rendions ce petit hommage. Le présent article a été publié dans le Record Memory Club magazine n° 76 de février 2009. Hélas, Johnny est décédé à 89 ans le 25 décembre 2009.

 

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Johnny Peret au "Square Pub" de la place Keym à Watermael-Boitsfort en juin 1973

Photo Alain Bosseray

 

 

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par CLAUDE BOSSERAY

 

 

Âgé aujourd'hui de 88 ans, Georges dit Johnny Peret coule une retraite paisible à Koekelberg aux côtés de sa dévouée épouse Mina. La vie nocturne trépidante de musicien ne l'a pas épargné, le diabète, maintenant fort heureusement sous contrôle, l'a rendu presque aveugle mais sa passion pour la musique et le jazz en particulier est restée intacte. C'est ainsi qu'il passe à présent le plus clair de son temps à écouter des cassettes qu'une poignée d'amis du Sweet And Hot lui renouvellent régulièrement.

 

Accordéoniste, vibraphoniste et surtout batteur mais aussi à l'occasion bassiste, bongoïste, percussionniste, chanteur, arrangeur et chef d'orchestre, Johnny Peret voit le jour à Bruxelles le 27 juin 1920 dans une famille de musiciens amateurs: son père, Jules Peret (1890-1977) joue de la batterie et son frère aîné, Jean Peret, premier prix de violon, joue également du saxophone-ténor et il s'inspire tout naturellement de Coleman Hawkins. Dans un tel contexte, quoi d'étonnant à ce que Johnny se destine à la musique lui aussi. À neuf ans, il apprend le violon qu'il délaissera bien vite pour l'accordéon. C'est sur cet instrument qu'il débute une carrière de musicien amateur en 1939 aux côtés de son frère Jean au sein de l'Amateur Dance Orchestra du pianiste Jean Callebout en la salle Régina dans le bas de la chaussée de Waterloo près de la Porte de Hal. L'année suivante, il entreprend des cours de percussions à l'Académie de Musique d'Anderlecht tout en poursuivant ses activités musicales nocturnes, c'est ainsi qu'il se produit notamment, toujours à l'accordéon,  au "Crème Kot", rue Neuve, en compagnie notamment du guitariste Jo Postula et du clarinettiste José Paessens.

 

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1941, la Belgique est occupée et Johnny Peret, comme tant d'autres, est déporté en Allemagne et est placé sous le contrôle de la Reichmusikkammer. C'est ainsi qu'il est amené à jouer de la batterie avec le pianiste anversois Tony Vaes, Jo Postula à la guitare, Guillaume Grijnrock à l'accordéon  et deux musiciens originaires de Alost. C'est aussi l'époque où il fait la connaissance de Mina Weinman à Nürnberg. À l'occasion d'un congé, il retrouve le saxophoniste et chef d'orchestre Charlie Calmeyn (membre du Record Memory Club), lui aussi victime du travail obligatoire en Allemagne.

 

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Premier engagement à la salle Régina, chaussée de Waterloo près de la porte de Hal en 1939 – Orchestre Jean Callebout (piano) et de g. à dr.: Achille Poncet (b),  Adolphe Niclot (dms) et à l'avant-plan: Max ?Reiger (Suisse) (bar), Jean Peret (ten,vln), Jef Van Camp (alt), trompettiste et tromboniste non identifiés et Johnny Peret (acc).

 

 

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Au "Crème-Kot", rue Neuve à Bruxelles en 1940.

De gauche à droite: Jean Berry (g), Lou Sauvage (b), Jo Postula (g), José Paessens (cl) et Johnny Peret (acc).

 

 

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Heidelberg 1950 – de gauche à droite: Francy Boland (p), Luce Barcy (voc), Johnny Peret qui remplace Marcel Rigot, malade (b), Al Goyens (tp), Herlman Sandy (dms!) et Bobby Jaspar (ten).

 

 

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Heidelberg, 1950 – de gauche à droite: Sadi (vib), André Putsage (dms), Mina Weinman (Madame Peret), Johnny Peret (dms), Constant Letellier (cl,ten), Pierre Robert (g), Bobby Jaspar (ten), Al Goyens (tp), Luce Barcy (voc), Madame Boland et Francy Boland (p,arr).

 

Aux souvenirs de Johnny Peret, Calmeyn est très débrouillard et, de retour en Allemagne à l'Astoria de Nürnberg en 1944, il obtient l'autorisation d'engager Johnny dans sa formation. En font également partie le pianiste Albert Omloo, le batteur bruxellois Franck Bergen et l'excellent accordéoniste John Uyter. Bien évidemment, le répertoire se compose essentiellement de musique de variété. Le 2 septembre 1944, veille de la libération de Bruxelles, Peret ne sait plus trop comment mais il est de retour à Bruxelles avec Charlie Calmeyn, probablement grâce à l'habileté de celui-ci à se tirer d'affaire en toutes circonstances.

 

1945, les hostilités sont terminées mais Johnny Peret n'échappe pas pour autant à ses obligations militaires (trois mois à Epping Forest près de Londres, trois mois à Bradford dans le Yorkshire et six mois en Belgique). Démobilisé en 1946, il décide de devenir musicien professionnel et débute en free lance dans les boîtes de nuit de Bruxelles.

 

1947-1948 – Retour en Allemagne mais cette fois dans le cadre d'un U.S.O. Tour Show et il joue à présent du jazz en compagnie notamment du pianiste Alex Dumoulin, du violoniste Robert Joassin et du formidable clarinettiste Jef Verhaegen. Johnny retrouve Mina qu'il épouse et voit enfin sa fille née dans l'intervalle en 1945.

 

Fin des années quarante, début des années cinquante, il travaille très régulièrement, essentiellement comme musicien de variétés dans tous les night-clubs et cabarets de la capitale, "Chez Paul au Gaity", rue Fossé aux Loups, au "Moulin Rouge", à la Place de Brouckère, au "Bœuf sur le Toit", rue du Bastion à la Porte de Namur, au "Florida", rue du Pont Neuf, et il fréquente également le "Si-Bémol", rue aux Fleurs, lieu de rendez-vous des artistes de cabaret, il y retrouve entre autres Georges Meus, Charlie Calmeyn, Léo Delsemme, etc.

 

1950 – Tournée de quelques mois en Allemagne avec la formation du trompettiste Al Goyens qui comprend Bobby Jaspar au ténor, FrancyBoland au piano, Johnny Peret à la basse (qui remplace Marcel Rigot, malade), Herman Sandy aux drums (eh oui!) et la chanteuse Luce Barcy[1]. La tournée s'achève et les musiciens reviennent en Belgique mais Johnny reste en Allemagne et se fait engager comme accordéoniste dans le quartet du vibraphoniste allemand Danny "K" (ainsi nommé pour sa ressemblance avec le comédien, fantaisiste et chanteur Danny Kaye)  avec lequel il fait le tour des camps militaires et des hôpitaux U.S.

 

En 1954, à Heidelberg, Johnny Peret fait partie pendant quelques semaines de l'orchestre du saxophoniste ténor Jean Kesteman, alias Johnny Kay[2]. La formation comprend entre autres les trombonistes Pol Delannoit et Léo Delsemme, le saxo-ténor Alex Scorier, le pianiste hollandais Cor Weezenaar et la chanteuse Francine André.

 

1955, en tant que drummer il tourne durant trois mois dans les camps U.S. en Allemagne avec le Jazzband du clarinettiste et saxophoniste-alto autrichien Fatty George. Font également partie de la formation son fidèle trompettiste et tromboniste WilliMeerwald, le pianiste OssiFeldkirchner, tous deux autrichiens également, ainsi que le tromboniste allemand Hanz Ehrlich, le guitariste Dick Vleeschroyer, le bassiste Dick Booth, tous deux hollandais, et la chanteuse anglaise Phyllis George, sans lien de parenté. Au départ de Wiesbaden ils partent pour Londres sous l'égide des Forces Américaines en compagnie des Deep River Boys, célèbre groupe vocal, et d'une troupe d'artistes de music-hall. De retour au pays, Johnny Peret remporte le 13 novembre 1955 la coupe "Max Roach" du meilleur drummer au Tournoi International de Jazz organisé par le Hot Club de Belgique au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles.

 

Durant cette période, 1956-1957, Johnny Peret accompagne régulièrement Jacques Pelzer, Sadi, Jack Sels ou Benoit Quersin à la "Rose Noire", de la Petite rue des Bouchers à Bruxelles, à côté du restaurant "Aux Armes de Bruxelles"[3].

 

[1]   Dans son livre "Bobby Jaspar, itinéraires d'un jazzman européen (1926-1963)", Jean-Pol Schroeder précise à la page 179 que le quintet, basé à Frankfort, tourne dans les différentes bases de l'armée américaine, enregistre le 1er août pour l'AFN/NBC puis en novembre est engagé au Stardust Club de Wiesbaden.

[2]   Sans rapport avec le pianiste, organiste et chanteur Jean Verstraeten qui, s'il faut en croire Robert Pernet, a opté pour le même pseudonyme.

[3]   Pour mémoire, voir l'article de Marc Danval consacré à la "Rose Noire" dans le n° 59 du Record Memory Club magazine (décembre 2002).

 

 

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Mannheim 1954 – De gauche à droite: Johnny Peret (dms), Jean Kesteman, alias Johnny Kay (ten), Paul Delannoit (tp,v-tb) & Alex Scorier (ten)

 

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Erlangen, 1955 – De gauche à droite: Fatty George (alt,cl), Dick Vleeschroyer (g,b),

Phyllis George (voc) & Johnny Peret (dms).

 

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19/03/2016
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